Plogoff, combat pour la vie / Téléphone, “Au cœur de la Nuit”

Une centaine de milliers de personnes ont participé à la manifestation organisée les 24 et 25 mai 1980 autour du site choisi, à Plogoff, dans le Finistère, pour installer une centrale nucléaire. Il n’y a pas eu d’incident notable. Ce sont les manifestants qui organisaient eux-mêmes la circulation, le garage des véhicules, l’organisation des ” campements “, aidés par la police locale ou la gendarmerie. Les forces de l’ordre sont restées remarquablement discrètes.

Ils étaient tous à Plogoff, les “Larzac”, les objecteurs de conscience, les écologistes hostiles au remembrement, mais aussi l’Organisation communiste des travailleurs, la Ligue communiste et beaucoup d’autres. Durant deux jours, les forums sur les énergies de remplacement, les séances de cinéma sur les méfaits du nucléaire, les discussions spontanées qui s’engageaient entre les responsables d’un stand et leurs visiteurs assis en tailleur devant eux s’étaient succédé.

La fête est parfois plus difficile que la bataille. Ce sont les habitants de Plogoff, pêcheurs, cultivateurs, femmes et enfants qui, au nom de la Bretagne, se sont battus contre le projet de la centrale nucléaire. Ce sont eux qui ont résisté de toutes leurs forces durant l’enquête d’utilité publique organisée, avec l’appui de la police, du 31 janvier au 14 mars. Pouvaient-ils aujourd’hui solliciter et accepter toutes les ” solidarités “, sans ambiguïté ?

” Nous ne sommes pas venus donner de leçon aux Bretons, comme des anciens combattants “, affirme un ” Larzac “. ” Mais parce que leur bataille ressemble à la nôtre : un beau jour un projet, venant de très loin, de technocrates parisiens, qui ne leur avaient pas demandé leur avis, leur est tombé sur la tête… ” ” Population crédule, implantation facile “, avaient dit les pouvoirs publics pour Plogoff. ” Il n’y a que des tas de cailloux et des vieux “, avaient-ils affirmé du Larzac. Alors on a dit non. C’est cela notre lutte. “

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En 1980, un an seulement après la sortie de Crache ton Venin, TELEPHONE retrouve le studio pour y enregistrer leur troisième album très attendu, Au Cœur de la Nuit, il devient double disque d’or en deux mois, grâce à deux tubes, « Argent trop cher » et « Au cœur de la nuit ». Et si ces deux morceaux sont des classiques aux riffs ravageurs et aux mélodies gravées dans la plupart des têtes, elles ne sont pas les seules chansons de cet album, où de très bonnes idées s’enchainent en évitant presque parfaitement les fautes de goût.

Le style téléphone est toujours aussi féroce, mais l’on sent progressivement que les musiciens ne se contentent plus de leurs schémas-types et risquent certains changements de style : ballade, funk, acoustique jazzy et même un morceau uniquement composé de voix et de percussions. Et soyons francs, ces expérimentations s’avèrent surprenantes et réussies, et rajoutent beaucoup de saveur à l’album.

En 1980, TELEPHONE s’éloigne donc progressivement de leurs influences originelles et on s’étonne, au terme de notre écoute, de constater à quel point Au Cœur de la Nuit peut posséder une ambiance homogène tout en étant composé de morceaux aussi hétérogènes. La cause ? Sans doute une ambiance au sein du groupe encore très bonne à l’époque, une inspiration à toute épreuve, un public qui le leur rend bien, une technique qui s’améliore grâce à l’expérience, mais surtout, une envie de composer.

1979

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