The Cars

Impossible de résister au nom, apparemment personne n’y avait pensé avant eux C’est en 1978 que le groupe The Cars voit le jour, les bacchanales*  punks sont à peine digérées, la new wave ne fait que se profiler. Ils viennent de Boston, ville sage, ville lointaine, où la scène rock underground se réduit à quelques noms (Modern Lovers, Real Kids) et à un club aux airs de cave judicieusement baptisé The Rat. Les Cars vont devenir des stars en quelques mois, ils sont prêts, en ordre de bataille, ils n’ont rien de premiers communiants. Avec ses airs de loup maigre et d’intello rock, Rick Ocasek, leur leader, file sur la trentaine, il a déjà traversé quelques modes et écumé la côte Est des Etats-Unis. Portée donc par la voix légèrement acide de Rick Ocasek, pas très loin de celle de David Byrne, la musique des Cars est une drôle de guimbarde, rutilante et profilée comme une bombe, chic et ringarde, un brin vulgaire, carburant sur des riffs et des paroles d’un autre temps La mode est à la pop, format court, bien calibré, chansons de trois minutes qui tournent le dos aux suite échevelées des années hippies et ramassent l’énergie punk pour la concentrer en vignettes radiophoniques. Le Denis de Blondie et le Psychokiller des Talking Heads sont des modèles du genre et les Cars arrondissent les angles. Le son éclatant et lourd de leur premier album est façonné par un Londonien, Roy Thomas Baker, qui a vécu à fond les années glam et qui vient de mettre en scène l’envolée grandiloquente de Queen. Le producteur capte l’élégance des chansons de Ric Ocasek, il joue avec les sonorités électroniques futuristes et tous les bip-bip de l’espace, mais il n’est pas là pour s’amuser. Il enfonce le clou FM tant qu’il peut et brasse les époques avec malice, les solos de guitares sont énormes et les synthés dégringolent en nappes épaisses. The Cars est un premier album d’une efficacité absolue, assez parfait dans son genre, à la jointure de deux époques, réchauffant les restes de Roxy Music, tout en préparant le terrain pour tous les Foreigner d’Amérique et d’ailleurs. Le triomphe du moteur hybride.

Le verso de la pochette prend le contrepied du glamour affiché en façade. Cinq pauvres types photographiés dans la nuit comme s’ils étaient pris dans les phares. Rick Ocasek, le bon génie pop, se tient à l’arrière-plan, pantalon de skaï brillant et grimace absurde, les autres jouent à singer de vagues héros du rock. Il faut encore s’arrêter sur la pochette intérieure composée par l’artiste du groupe, David Robinson, le batteur. Il court les garages de la région pour récupérer des images, des vieux calendriers, des images de berlines et c’est lui qui peaufine  l’imagerie du groupe : formes chromées, bolides rétro, mannequins alanguis, gants de cuir, tissu léopard et limousine, l’érotisme total, le rêve américain de la banquette arrière.

Ils réitéreront l’année suivant avec l’album “Candy O” dont la musique est dans la continuité de ce premier disque. La pochette est quant à elle bien plus aguicheuse et ravira tous les passionnés de belle carrosserie.

* Les bacchanales étaient des fêtes religieuses célébrées dans l’Antiquité. Liées aux mystères dionysiaques, elles se tenaient en l’honneur de Bacchus, dieu romain du Vin, de l’Ivresse et des Débordements, notamment sexuels.

Du velours dans les oreilles

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